Gaston Bachelard

(1884 – 1962) philosophe français des sciences, de la poésie et du temps

« Devant une flamme, dès qu’on rêve,
ce que l’on perçoit n’est rien au regard de ce qu’on imagine. »

« Notre appartenance au monde des images est plus forte, plus constitutive de notre être que notre appartenance au monde des idées ». Il plaide alors pour les douceurs de la rêverie et se laisse aller aux évocations que lui inspire « la flamme d’une chandelle ».

Gaston Bachelard
( 1884 – 1962 )
Gaston Bachelard est l’un des principaux représentants de l’école française d’épistémologie historique.
Dans la deuxième partie de son oeuvre, Bachelard se consacre à une étude approfondie de l’imaginaire poétique.
 

La flamme
d’une chandelle

Le philosophe analyse la symbolique de la flamme,
qu’il qualifie d’un des plus grands opérateurs d’images
parce qu’elle force l’homme à imaginer, sous des aspects philosophique, poétique, esthétique ou encore littéraire.

Il humanise la flamme et la fait centre de toute demeure,
un être familial gardien des souvenirs.
 

EXTRAIT

 
Les images-phrases qui peignent, qui disent les flammes végétales sont autant d’actions polémiques contre le sens commun endormi dans ses habitudes de voir et de parler.
Mais l’imagination est si sûre, avec une image neuve, de tenir une vérité du monde que la polémique avec les non-imaginants serait du temps perdu.
Mieux vaut pour l’imaginant parlant à des imaginants dire encore, dire sans fin de jeunes phrases sur les flammes de la vie végétale.
Ainsi commence le règne des images décisives, des décisions poétiques.

 La flamme est un monde pour l’homme seul.

Alors, si le rêveur de flamme parle à la flamme,
il parle à soi-même, le voici poète.

En agrandissant le monde, le destin du monde, en méditant sur le destin de la flamme, le rêveur agrandit le langage puisqu’il exprime une beauté du monde.

Par une telle expression pancalisante, le psychisme lui-même s’agrandit, s’élève.

La méditation de la flamme a donné au psychisme du rêveur une nourriture [… ]  »
 
 

Extrait « La Psychanalyse du feu, » 1938

 
« Loin de s’émerveiller, la pensée objective doit ironiser. »

« Il suffit que nous parlions d’un objet pour nous croire objectifs. »

« Il faut donc opposer à l’esprit poétique expansif, l’esprit scientifique taciturne pour lequel l’antipathie préalable est une saine précaution. »

« Le feu est ainsi un phénomène privilégié qui peut tout expliquer.
Si tout ce qui change lentement s’explique par la vie,
tout ce qui change vite s’explique par le feu.
Le feu est l’ultra-vivant.
Le feu est intime et il est universel.
Il vit dans notre cœur.
Il vit dans le ciel.
Il monte des profondeurs de la substance et s’offre comme un amour.
Il redescend dans la matière et se cache, latent, contenu comme la haine et la vengeance. »

« Le rêve chemine linéairement, oubliant son chemin en courant. La rêverie travaille en étoile. Elle revient à son centre pour lancer de nouveaux rayons. »

« [Le feu] matérialise la fête des hommes. Aussi haut qu’on puisse remonter, la valeur gastronomique prime la valeur alimentaire et c’est dans la joie et non pas dans la peine que l’homme a trouvé son esprit.
La conquête du superflu donne une excitation spirituelle plus grande que la conquête du nécessaire. L’homme est une création du désir, non pas une création du besoin »

« Moins monotone et moins abstrait que l’eau qui coule,
plus prompt même à croître et à changer que l’oiseau au nid surveillé chaque jour dans le buisson, le feu suggère le désir de changer, de brusquer le temps, de porter toute la vie à son terme, à son au-delà. »

 « Le rêve est plus fort que l’expérience. »

 « L’amour n’est qu’un feu à transmettre.
Le feu n’est qu’un amour à surprendre. »

« Avant d’être le fils du bois, le feu est le fils de l’homme. »
« La manière dont on imagine est souvent plus instructive que ce qu’on imagine.« 

⎯ La Psychanalyse du feu, Gaston Bachelard, éd. Gallimard, coll. « NRF idées », 1949
(« Psychanalyse et préhistoire »)

Source : https://fr.m.wikiquote.org/wiki/Gaston_Bachelard