C’est donc cela aimer

⎯ Jean Diharsce

 

Oeuvre : Jaya Suberg

A

u bout de tant de temps et de vies, de corps, effleurés, un instant ou plus longtemps parfois, alors qu’on ne croit plus au réel de ce verbe (et le bonheur avec), se laisser envahir totalement par un autre qui vient vous habiter, vous complète et vous apporte enfin tout ce qu’il vous manquait, sans qu’il en soit prison ou même dépendance, et qui devient le plus, le seul mieux qu’il vous reste à partager peut-être.

C’est ce frisson qui vient au bout d’un doigt tendu
et vous montre le vent qui prend juste une place entre un ciel qui se couche, rouge, et la nappe de brume en foulard sur la vague, de l’émotion, ensemble, sans cesse répétée, du beau en farandole partout où la vie lève, du rire des enfants qui se courent la main, au sanglot qui vous monte devant l’inadmissible, cette larme à sa joue qui vous fait différent.

C’est ce mal qui vous prend, comme un sanglot en boule,
quand la fête s’achève, pour repartir plus tard (peut-être, qui le sait ?),
que vous gardez en vous quitte à s’en étouffer ce trop plein de désir de rester dans des bras, car vous savez déjà que les couleurs des jours qui demeureront belles, seront un peu moins vives et moins bien dessinées -vous les raconterez comme on fait un poème- ou qu’on entrouvre un livre.

Juste un rien qui fait vivre
et qui n’est pas un mot lorsque vous le savez.
C’est donc cela aimer. »

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