poète, romancier, dramaturge et chroniqueur kabile
« Si tu veux dominer un peuple, fais-lui oublier ses racines, déguise-le en pantin, fais-le tourner, amuse-le, parle-lui ensuite de châtiments et de mort.
Si tu veux l’assimiler, dis-lui que sa langue est un idiome, sa culture du folklore, sa patrie le monde. j
Si tu veux le faire disparaître, et si tu ne peux pas l’exterminer physiquement, colonise sa mémoire et emplis son histoire de héros imaginaires… »
né le 21 novembre 1978
à Bou Mahni dans la commune d’Aïn Zaoui
dans la Wilaya de Tizi Ouzou, en Algérie,
Il vit au Québec depuis 2008.
L’Algérie bouillonne. Le peuple rumine sa colère. Pour étouffer toute révolte, les autorités arrosent les jeunes de l’argent du pétrole. Kamal Storah, alias Kâmal Sûtra, obtient, après une longue période de chômage, une subvention de l’État et achète un minibus. Quelques mois plus tard, c’est la désillusion : il n’y a plus de passagers. Kâmal Sûtra décide de transformer son minibus en bordel ambulant. Dénoncé par les islamistes, traqué par la police, il fuit vers le Sahara…
D’une plume crûment réaliste, Karim Akouche use et abuse du droit au blasphème. Son roman, haut en couleur et en révolte, raconte une jeunesse frustrée et sans repères, dans une Algérie schizophrène, suspendue entre archaïsme et rêves de liberté.
⎯ EXTRAIT
«Allah akbar», tu entends? Comment ne pas devenir frigide? Toujours la même cassette. Qu’on innove un peu, qu’on mette autre chose: du rock, du blues, du chaabi, du groove, du gospel, du Ravel, du Mozart, du Chopin… Il faut que je parte d’ici… mais où ? À l’étranger ? En France ? En Australie ? En Abyssinie ? En Suède ? En Israël ? Au Nunavut ? Sur la planète Mars ? Qu’importe ! Les chemins ne mènent plus à Rome, tous nos boulevards aboutissent au désert… Mes yeux et mes oreillesj sont saturés : Allah ici, Mohammed là, le Jugement dernier, le paradis, les houris, les flammes de l’enfer… On a fait de Dieu un sadique, camarade. Un Duvalier, un Mugabe, un Gengis Khan. Il n’a délégué personne pour montrer aux hommes le droit chemin. Dieu est adulte. Il est majeur et circoncis. Moustachu, il n’a pas besoin de tuteur… »
« L’islam, l’islamisme et leurs avatars,
la laïcité et ses ennemis,
la gauche et ses errances,
l’Algérie et ses démons,
la crise de la citoyenneté,
l’ultra-consumérisme
et le règne du spectacle,
les conséquences des « printemps arabes » …
autant de thèmes abordés dans les textes de combat
et de réflexion rassemblés dans ce livre. »
Leurs titres annoncent la couleur :
« Déchire ton niqab »,
« Les faux humanistes et les idiots utiles de l’islamisme »,
« Portrait de l’islamiste en fossoyeur du monde »,
« Percheurs de haine, je vous emmerde »,
« L’Algérie arabe est une imposture »…
Point d’orgue de ce recueil, une « Lettre à un soldat d’Allah » adressée à un jeune homme conquis par l’idéologie djihadiste, que l’auteur questionne d’un « tu » assassin.
Un monologue poétique qui célèbre la femme et qui dénonce les fossoyeurs de notre civilisation.
Un cri de colère, un hymne à l’harmonie entre les femmes et les hommes, un plaidoyer pour une monde juste.
Le lecteur y découvrira des destins croisés de femmes
qui se battent de par le monde
contre l’intégrisme religieux,
les oppressantes traditions,
le patriarcat,
l’excision,
la marchandisation du corps féminin…
« Toute femme est une étoile qui pleure »
est un cri de colère, un hymne à l’harmonie,
un plaidoyer pour un monde juste. »
Extrait de « Toute femme est une étoile qui pleure »
éd. Dialogue Nord-Sud, 2013.
Et je revois ma mère le dos courbé comme un dôme, les talons gercés, le front plissé, un enfant mordant son sein et moi griffant ses joues.
Je la revois se débattre comme un roseau contre les tempêtes et donner des graines à ses coqs, à ses chatons, à ses moucherons.
Dans sa demeure en torchis, elle se prenait la tête à dix doigts et se remplissait une cruche de larmes qu’elle buvait quand elle avait faim, qu’elle brisait quand elle avait soif.
Elle avait l’art de pleurer et la décence de gémir tout bas quand dans le grenier il n’y avait que parois rancies, cendres et urine de rats.
Elle faisait des thés avec des feuilles de néfliers, des fleurs de citronniers et des pousses sauvages.
Elle faisait des galettes avec des glands, avec des racines, avec des écorces, avec le sel de sa sueur.
Elle dessinait des motifs sur des objets en terre cuite et nous contait des fables d’ogresses et de sorcières.
Avec un peigne édenté, elle se brossait la tignasse qu’elle lavait à l’eau de roche et au savon de Marseille.
Elle nouait un pagne couleur des champs autour des hanches et elle accrochait une broche à son sein qui allaitait les misères.
Ma mère était une lavandière qui essorait les tuniques de mon père dans les rivières croupissantes.
Ma mère était une muletière qui cueillait des fagots de bois des forêts hantées.
Ma mère était une mécanique qui avait une main sur le feu, l’autre dans l’eau, un pied dans la terre et l’autre dans le ciel.
Ma mère était belle et racée, triste comme un poème, brave comme la poussière, douce comme une divinité qui boite.
Ma mère réside dans la déchirure de l’humanité,
dans la faille du temps.
Ma mère appartient à la civilisation du silence.
Elle a la cicatrice dans l’âme et la plaie dans l’histoire.
Elle habite dans l’injustice éternelle,
elle habite dans la souffrance des dieux.
Ma mère habite à l’ombre des saisons,
ma mère a loué un coin au pied de la religion,
ma mère est enchaînée au pied de l’homme. »
« Karim Akouche sait dire ce qu’il a à dire, sans peur et sans fioritures.
Très rares, dans sa génération, sont ceux qui s’engagent intellectuellement, moralement et politiquement dans le combat contre l’intolérance, le fanatisme, le nationalisme et autres folies qui font le malheur des peuples. »Boualem Sansal
⎯ Dans le Journal de Montréal
Karim Akouche déclare:
« L’islamiste gagne chaque jour des batailles contre l’Occident.
Il a réussi à restreindre la liberté de pensée, à séparer les femmes des hommes dans les piscines, à halaliser les menus scolaires, à fragiliser la laïcité, à ouvrir des mosquées dans les universités, à gagner des procès contre des États, à verrouiller plusieurs institutions internationales…
Le pire, c’est d’être traité d’islamophobe par des Québécois.
Suffit le sanglot de l’homme blanc. Je m’oppose aux accommodements raisonnables parce que personne ne devrait imposer sa foi.
L’islamisme est proche du consumérisme.
L’islamisme veut tuer le citoyen pour en faire un croyant.
Le consumérisme veut tuer le citoyen pour en faire un consommateur.
Il faut réenchanter le monde. »
⎯ Le révolutionnaire somnambule, Alger.« Après la prière du vendredi. Vite, chausse tes sandales, sors, frère. Marche, marche, marche. Ris, danse, chante. Offre des fleurs, des bonbons, des dattes et des beignets. Faut montrer au monde entier que tu es pacifique, généreux, doux, civilisé. Faut travailler l’image, la maquiller avant de la poster sur les réseaux sociaux. Faut cacher les ordures, les guenilles, les défauts, les failles, les divisions. Faut surtout pas dire les vraies choses, nommer le mal, montrer les nœuds et les plaies. Tourne en rond, ou autour du pot, comme un agneau ou un veau, danse et souris. Ménage les militaires et les islamistes, les deux têtes du monstre qui étouffe ton pays. Marche, en kamis, en casquette, en voile, en drapeau palestinien, avec ce que tu veux, mais jamais avec le drapeau berbère. Tu as révolutionné la révolution, frère. Toi, tu n’es pas dur comme Robespierre. Tu ne coupes pas la tête du tyran. Tu le caresses dans le sens de la barbe et du képi. Bravo. Ta nouvelle famille révolutionnaire est plus au moins soudée, ou plus au moins divisée, mais qu’importe, tout est confus, une sorte d’Arche de Noé, ou de Tour de Babel, une comédie bien algérienne chaude et épicée, et tant mieux, ou tant pis, tout est confus, faut s’en foutre, un peu, beaucoup, continue de marcher, comme un somnambule, épuise jambes et semelles, offre des fleurs, suce des bonbons, danse, chante la liberté. » ⎯ Histoire des lièvres devenus lapins,
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